Pleine conscience

L’entropie nous guette (et ça fait chier, un peu, quand même)

Hier, je suis tombée sur la magnifique reprise de Heroes par Depeche Mode.

Je savais déjà que le groupe anglais la reprenait en live. (Apparemment, Amanda Palmer a pleuré comme un bébé quand Dave Gahan & co ont chanté ce morceau au Madison Square Garden le soir du 11 septembre). Par contre, j’ignorais qu’ils allaient en faire une version studio, et quelle version.

Pendant que la guitare de Martin Gore résonnait de façon envoûtante dans ma chambre, je n’ai pas pu m’empêcher de voir une certaine tristesse dans cet hommage.

Putain, Bowie est mort, et ça fait chier.

Mais y a pas que lui.

Alan Rickman. Prince. George Michael. Carrie Fisher. Des gens qu’on croyait, à tort, un peu immortel, parce qu’ils faisaient partie de notre paysage culturel depuis… Ben, pour ma part, depuis toujours, ou presque. (Je suis née en 1980.)

Depuis que le chéri s’est installé à la maison, je lui dis souvent en rigolant que l’entropie nous guette (parce qu’il bouscule ma maniaquerie et mon côté psychorigide sur le rangement de la maison).

Mais c’est pas juste une blague. C’est un fait, une certitude, une fatalité, quelque part, même si je déteste ce mot-là.

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On n’est plus aussi jeune qu’avant. Nos icônes, celles avec lesquelles on a grandi, foutent le camp les unes après les autres. Et même si c’est dans l’ordre des choses, des fois, ça me fout un peu les boules, quand même.

On vieillit, et je ne sais pas très bien ce que ça me fait. Mon amie Armalite a publié un billet très touchant sur le sujet la semaine dernière : They say youth is wasted on the young. (Titre anglais, texte en français.) Amanda Palmer a également évoqué le sujet sur Instagram. Il faut croire que c’est dans l’air du temps.

Je n’ai jamais eu peur de mourir et j’ai toujours pensé, naïvement peut-être, que ça ne me ferait rien de vieillir. Mais maintenant que j’arrive aux portes de la quarantaine et que je lis des témoignages comme ceux-là, ou que je constate comme je suis de plus en plus marquée par la mort des gens qui ont toujours fait partie de ma vie (proches ou célébrités, peu importe), je m’interroge.

Je n’ai pas attendu de pratiquer la méditation pour me rendre compte de l’impermanence des choses. Je sais qu’aucun de nous n’est éternel et je pense sincèrement que c’est une très bonne chose. Je suis convaincue que c’est notre mortalité, et la relative brièveté de notre passage sur Terre, qui rend notre existence si précieuse et qui lui donne tout son sens.

Mais, en même temps, les années passent, les gens disparaissent, notre physique change, et peut-être bien que ça fait un peu chier, quand même.

Ou que cette nostalgie douce-amère est le prix à payer pour tous les petits bonheurs passés et à venir. Allez savoir.

Illustration trouvée sur Pinterest.

12 commentaires sur “L’entropie nous guette (et ça fait chier, un peu, quand même)

  1. J’ai passé les portes de la quarantaine et je me rapproche de celles de la cinquantaine (et ce nombre, 50, me « stresse » plus que 40). Comme toi, je vois disparaître les personnes qui ont marqué mon adolescence et ma vie de jeune adulte (tu as oublié Robin Willimas dans la liste 😉 ; sa disparition m’a plus touchée que celle de Prince). Mes parents sont passés au stade d’aïeuls depuis que la mort de ma dernière grand-mère.
    Je n’ai pas peur de mourir, j’ai plus peur de mal vieillir et de devenir dépendante, que ce soit parce que le physique ne suit plus ou parce que je perds la boule. Je n’ai pas envie d’être un poids pour mon entourage.
    A côté de ça, plein de choses me font sentir « encore jeune ». Bien sûr, je sens bien que mon dos n’est plus aussi vaillant qu’avant, que les nuits blanches c’est un lointain souvenir (honnêtement ça n’a jamais été mon truc)… Mais j’ai de la chance côté physique (même si je remarque aussi certains plis apparaître sur mon visage quand je me regarde dans le miroir -pour le moment, je suis la seule à les voir semble-t-il-). Je me sens même moins « vieille » qu’il y a un an en arrière, merci le retour à la vie active (et 7kg en moins en 6 mois). Et je ne me sens pas vraiment nostalgique d’avant. En fait j’avance, je prends les choses comme elle vienne, je sais que je suis celle que je suis grâce à ce que j’ai vécu, le bon comme le moins bon.

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    1. Je me retrouve dans ce que tu dis, moi aussi j’ai peu de mal vieillir et de devenir dépendante. Je crois que ce qui m’étonne le plus, c’est de me sentir toujours aussi jeune dans ma tête, même si, en même temps, je suis consciente de la richesse (et du poids, parfois) des expériences que j’ai vécues. Je me demande si le mot « nostalgie’ est bien approprié parce qu’en fait, ce qui me manque, ce n’est pas le passé, c’est le fait que je n’entendrai plus jamais le rire de ma mère, je n’aurai jamais avec elle ces mille et une conversations que je déroule dans ma tête. Et, du côté des célébrités, ben on n’aura plus jamais de nouvelle chanson de Bowie, ou de film feel-good avec Robin Williams. (Son décès remontant déjà à quelques années, je l’avais effectivement omis dans ma liste.)
      Tout ça pour dire que c’est probablement le fait que je ne pourrai jamais présenter mon chéri à ma mère qui me travaille énormément en ce moment, et qui se mélange un peu avec tout le reste.

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  2. Ah, je suis bien d’accord. Quelle tristesse que l’éternité ! N’est-ce pas après tout notre impermanence qui rend nos vies dignes d’être vécues ? Quelle saveur auraient les bonheurs et les tristesses si nous avions l’éternité devant nous ? Il n’appartient qu’à nous-mêmes de trouver au fond de notre être la richesse de rendre beau ce qui ne dure pas… bisous ma Isa, et merci pour ces mots de sagesse.

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  3. Moi, j’ai peur de mourir. En fait, j’ai peur de mourir « jeune ».
    Peut-être encore plus maintenant que je suis maman.
    Et j’avoue que la quarantaine, ça m’a foutue une claque.
    Mais le regret que j’ai n’est pas tant sur le temps qui passe que sur l’impression d’avoir « gâché » ma jeunesse…
    Sur la maltraitance dont j’ai été victime et sur le nombre d’années qu’il a fallu pour en sortir.

    Mais bon, ça ne sert à rien de s’apitoyer là-dessus, il faut continuer à vivre et profiter avant la fin 😉

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    1. Tu as absolument raison. Et je te comprends, le seul moment où j’ai eu peur de mourir, c’est quand les enfants étaient petits. Il y avait un côté très animal dans cette peur-là, on était totalement dans la fusion et la dépendance à cette période, ce qui est bien normal. Maintenant, ma grande a 12 ans, et je commence à me faire jeter 😉
      Je suis désolée d’apprendre que tu as été maltraitée. Je ne connais pas les détails de ton histoire, c’est difficile d’écrire un commentaire approprié, mais je crois que tu peux être fière d’en être sortie et d’avoir pris ta vie en main. Et, surtout, je te souhaite de bien profiter de la vie que tu mènes à présent.

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  4. Voila un billet qui tombe pil, poil . Je vais fêter mon anniversaire en octobre et je suis bien installée dans la quarantaine. Je m’en fous un peu de vieillir si je vieillis bien, si je garde l’énergie, si je reste en bonne santé…..
    Mais voila je grisonne, je suis de plus en plus raide, chaque jour j’ai un peu mal quelque part (pas cool pour une angoissée) et j’ai de plus en plus la nostalgie de ma jeunesse. Bref même si je n’ai pas peur, j’ai pas tellement envie non plus de vieillir !
    Je suis née au début des années 70 et j’ai lu une petite phrase de Yann Moix « les années 70, c’était le dernier arrêt avant Wall Street » et c’est si juste – il me semble que le monde a perdu quelque chose d’un peu naïf, d’un peu insouciant ou c’est peut-être juste moi……
    Bref j’adore et je l’adopte.
    Très chouette billet as always.

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    1. Tu sais, je me demande parfois où sont passés l’optimisme et l’énergie des années 90… Peut-être qu’on ressent cette nostalgie parce que c’étaient des années formatrices pour nous, nos années jeunesse. C’est nous qui étions un peu naïves et insouciantes, pas le monde 😉 Je suis sûre que nos enfants diront la même chose de leur propre époque.
      Merci pour ton commentaire ❤

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  5. Ton billet me parle alors que je suis peu affectée par le décès de ces personnalités (qui ne se limitent pas à leur statut, incontestablement), que je ne connais pas bien car je réussis à avoir zéro culture cinématographique, musicale et artistique. Bon, je connais et adore Depeche Mode.

    En revanche, je suis plus souvent prise dans une spirale d’angoisse qu’avant, autant du fait de ma propre peur de mourir (en fin de mois, quand j’ai envoyé toutes mes factures, je suis rassurée aussi parce que je me dis que si je crève soudainement, y aura de quoi payer mes funérailles) (ça doit paraître assez flippant, dit comme ça, mais j’ai appris à rationaliser cette pensée) qu’à cause de l’état du monde. Je suis tiraillée entre mon envie de faire plus, à la David contre Goliath, et celle de vivre paisiblement, à l’abri de tout problème.

    À mon sens, c’est la peur de mourir qui est à l’origine des pires maux de notre société 2.0. Comment apprécier la vie si le temps n’a plus de sens ?

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    1. Tu ouvres une piste de réflexion intéressante. Pour moi, l’un des pires maux de notre société 2.0., c’est qu’elle nous déconnecte complètement de notre corps en nous faisant vivre uniquement dans notre tête. D’où le besoin de se rappeler que ce corps, il faut qu’on l’entretienne, qu’on le fasse bouger, qu’on en prenne soin, etc. C’est aussi, à mon avis, le meilleur moyen de redonner du sens au temps, puisque le temps marque et fait évoluer notre corps, justement. Mais peut-être qu’effectivement nous enfermer dans notre tête, c’est un moyen d’oublier notre mortalité… Mais, du coup, on en revient à ce que je disais, c’est notre mortalité qui nous permet d’apprécier la vie. En fuyant notre peur de mourir, on fuit aussi notre vie… dans un bel exemple de serpent qui se mord la queue 😉

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