
En 1893, les sorcières n’existent plus. Il y en avait autrefois, en pleine nature, à l’époque sombre d’avant les bûchers. Mais, désormais, la sorcellerie n’est plus que charmes proprets et comptines pour enfants. Si la femme moderne veut un semblant de pouvoir, c’est dans les urnes qu’elle l’obtiendra. Mais quand les sœurs Eastwood (James Juniper, Agnes Amaranth et Beatrice Belladonna) rejoignent les suffragettes de New Salem, elles partent en quête des traditions oubliées qui pourraient transformer le mouvement des femmes en mouvement des sorcières. Traquées par les ombres et la maladie, pourchassées par des forces qui n’ont aucune intention de laisser voter une sorcière (et encore moins de la laisser vivre), les trois sœurs vont devoir plonger dans la magie la plus ancienne, forger de nouvelles alliances et renouer le lien brisé qui les unit. En 1893, les sorcières n’existent plus. Mais elles vont revenir.
Un proverbe anglais dit qu’il ne faut pas juger un livre à sa couverture (autrement dit, qu’il ne faut pas se fier aux apparences). Mais s’il y a parmi les lecteurs ou lectrices de ce blog une personne capable de résister à cette sublime couverture, qu’il ou elle me jette la première pierre. Ajoutez-y ce résumé alléchant, et vous comprendrez pourquoi j’ai demandé ce livre à Noël. Des sorcières et des suffragettes dans un même roman ? C’est un peu un rêve de féministe, non ?
De fait, je peux attester que The Once and Future Witches est une œuvre intense et féministe à souhait qui tient presque toutes ses promesses. J’ai passé un très bon moment en compagnie des sœurs Eastwood et je ne regrette pas du tout mon séjour à New Salem, même si, au début du roman, on n’a franchement pas envie de s’y attarder. Les ouvrières de la filature se font régulièrement agresser par le contremaître, l’avortement est illégal et clandestin et les personnes de couleur vivent dans un ghetto. Heureusement que notre réalité à nous est bien plus riante, n’est-ce pas ? (Oh wait…)
C’était le roman parfait à lire après le Sorcières de Mona Chollet, le Circé de Madeline Miller et Blanc autour de Wilfrid Lupano et Stéphane Fert. Toutes ces lectures, qu’il s’agisse d’essais, de fictions historiques ou de romans fantastiques, se complètent à merveille pour dessiner un tableau édifiant de la domination de la femme et des personnes de couleur par l’homme blanc. The Once and Future Witches se veut d’ailleurs très inclusif puisqu’il met en scène, par le biais de ses trois héroïnes, une histoire d’amour lesbienne et interraciale, une histoire d’amour hétéro classique (mais qui n’occupe pas le devant de la scène, loin de là) et une situation de handicap léger (l’une des sœurs boîte suite à un accident survenu dans sa jeunesse).
Il est question de sororité bien sûr, au sens premier du terme, puisque les sœurs Eastwood, autrefois unies comme les doigts de la main, vont devoir ressouder leurs liens familiaux mis à mal par le patriarcat. Mais cette sororité s’applique également à toutes les femmes de New Salem qui vont s’unir pour contrer la menace politique et ésotérique qui voudrait plus que jamais les soumettre. Ensemble, elles vont tenter de retrouver les mots et les traditions des sorcières qui ont péri brûlées dans la Salem originelle, afin de ramener la magie dans le monde.
Les personnages sont merveilleux, et j’ai adoré la manière dont sont présentés les sorts au début de chaque chapitre. Mais alors, avec tout ça, pourquoi est-ce que je ne crie pas au coup de cœur ? Tout simplement parce que je n’ai pas tellement adhéré au personnage du grand méchant. Je sais bien que c’est un archétype censé incarner à lui seul tout ce qu’est le patriarcat mais, au bout du compte, tout ramener à un affrontement entre nos héroïnes et lui, c’est gommer les racines systémiques des problèmes qui sont si justement décrits au début du texte ou dans les ouvrages que j’ai cités ci-dessus. J’ai trouvé que c’était un peu trop simple et réducteur.
Cela étant, j’ai tout de même mis quatre étoiles sur cinq à The Once and Future Witches sur Goodreads, car ça n’en reste pas moins un roman intelligent, passionnant et bien écrit qui m’a tenue en haleine tout du long et que je vous recommande chaudement.
J’ai lu ce livre dans le cadre du Blossom Spring Challenge au printemps dernier. Cette lecture m’a permis de valider la catégorie « A bord du Tardis » (histoire se déroulant à une autre époque) dans le menu « Escapade printanière ».
C’est un sujet qui m’intrigue et je suis très tentée par le livre de Mona Chollet….
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Il est aussi édifiant que passionnant !
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Salut 🙂 merci pour ce partage, je n’avais pas entendu parler de ce livre et ton article donne très envie !
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