
Premier coup de cœur de l’année, et non des moindres, Everything I Never Told You, traduit en français sous le titre Tout ce qu’on ne s’est jamais dit, est aussi passionnant et percutant que Little Fires Everywhere (La Saison des Feux), de la même Celeste Ng, que j’avais tant aimé à l’été 2020. De sa plume tranchante comme un scalpel, l’autrice écrit des tragédies familiales comme si c’étaient des thrillers haletants, et on n’en sort pas indemne. On aimerait pouvoir intervenir et empêcher le drame, car on s’attache à ces personnages terriblement humains dans leurs défauts, sauf que c’est impossible, puisque le drame a déjà eu lieu, et qu’on le sait d’entrée:
Lydia est morte. Mais sa famille ne le sait pas encore. Lydia est l’enfant préférée de Marilyn et James Lee. Elle a hérité des yeux bleus de sa mère et des cheveux de jais de son père. Sur ses épaules pèsent les désirs inassouvis de ses parents. Marylin veut que sa fille devienne le médecin qu’elle a renoncé à être et James veut qu’elle soit populaire à l’école et qu’elle ait plein d’amis. Comme si cela ne suffisait pas, Lydia doit faire face au racisme. Petits-enfants d’immigrants chinois, son frère, sa sœur et elle détonent au milieu des autres enfants d’une petite ville de l’Ohio à la fin des années 1970. Quand la police retrouve le corps de Lydia dans le lac près de chez elle, James, rongé par la culpabilité, fait des choix qui pourraient bien détruire son mariage. Marylin, dévastée, cherche un coupable à tout prix. Nathan, le frère aîné de Lydia, est convaincu que Jack, le mauvais garçon du quartier, a joué un rôle dans la mort de sa sœur. Quant à la petite dernière, Hannah, elle entend et voit bien plus de choses que sa famille ne l’imagine, et c’est peut-être la seule à savoir ce qui s’est vraiment passé.
Comme son titre l’indique, le roman parle de l’importance et du poids des non-dits. La frustration de Marilyn, les complexes de James, tout ce qui n’est pas verbalisé finit par dresser un véritable mur entre eux deux d’abord, puis entre eux et leurs enfants, et ce sont malheureusement ce silence et cette impossibilité de communiquer qui vont aboutir au drame. C’est d’autant plus poignant que l’autrice montre les deux côtés de la situation, on se rend compte à quel point c’est blessant pour Nath et Hannah d’être ignorés par leurs parents, mais on voit aussi combien c’est pesant pour Lydia d’être l’enfant prodige.
Comme dans Little Fires Everywhere, le récit s’appuie sur une critique sans concession de la société américaine. Il dénonce le racisme ordinaire et les sacrifices qu’on impose aux femmes dès lors qu’elles deviennent mères. Certes, aujourd’hui, contrairement à Marilyn qui n’a pas vraiment eu le choix dans les années 1960, nous pouvons faire carrière ou, du moins, nous pouvons travailler. Mais il est très difficile de trouver un équilibre entre les deux et l’on a souvent l’impression d’échouer sur tous les plans. La frustration est toujours là mais, sans vouloir manquer de respect à nos aînées, j’ai l’impression qu’elle a doublé.
Vous l’aurez compris, non content d’être extrêmement divertissant et touchant, Tout ce qu’on ne s’est jamais dit fait aussi réfléchir, ce qui est le propre des grands romans. De ce fait, je ne saurais trop vous recommander de vous plonger dans l’œuvre de Celeste Ng si ce n’est pas déjà fait !
Cette lecture me permet de valider une des catégories du Cold Winter Challenge 2021, « Un chalet sous la neige », dans le menu « Hiver sombre ». En effet, c’est quasiment un huis clos car on passe beaucoup de temps au sein de la famille Lee, qui voit très peu de monde à l’extérieur. Et il est bel et bien question d’enfermement et de solitude, rien n’étant pire que de se sentir seul.e au milieu des gens qu’on aime !
Merci pour ce partage Isa! Ce livre me tente bien, de par le sujet et la façon dont il est traité. Il y a souvent une raison derrière les drames de la vie.
Belle fin de journée!
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Absolument ! Belle journée Marie ❤
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Je n’avais vu que l’adaptation Netflix « The little fires everywhere ».
Le personnage de la femme blanche et riche (jouée par Reese Whiterspoon) m’avait fasciné. Elle est en apparence imbuvable et détestable. Et petit à petit, on comprend ses renoncements, ses colères, ses chagrins et tout ce qui l’a mené à s’oublier, à se mentir. Et on ne peut s’empêcher de compatir car on reconnait un peu de nos propres difficultés. Bref, tout ça pour dire que je découvrirais avec grand plaisir d’autres personnages aussi complexes !
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Oui, tu verras, les portraits sont toujours d’une très grande finesse et d’une très grande justesse !
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