Culture

[Lecture] Lucy Holland – Sistersong

Dans le royaume de Dumnonée, une ancienne magie réside dans le murmure du vent, les racines des arbres et la courbure des hautes herbes. Le roi Cador en était conscient, autrefois, mais il lui a tourné le dos, et la terre s’en remet désormais à ses trois enfants. Riva a le don de guérison mais ne parvient pas à effacer ses propres cicatrices car elles sont trop profondes. Keyne se bat pour faire accepter qui il est vraiment : le fils du roi. Et Sinne rêve de voir le monde et de partir à l’aventure. Tous trois redoutent de se retrouver confinés au sein de leur forteresse, le dernier bastion de leur peuple face aux envahisseurs saxons. Cependant, tout bascule le jour où la cendre tombe du ciel. Elle apporte avec elle Myrdhin, le magicien qui se mêle de tout, et Tristan, un guerrier qui porte de lourds secrets. Riva, Keyne et Sinne, pris au piège d’une toile faite d’intrigues, de trahisons et de souffrances, vont devoir lutter pour tracer leur propre chemin.

Quand j’étais ado, j’ai lu énormément d’histoires à propos de cette période charnière de l’histoire de la Grande-Bretagne, quand l’empire romain s’est écroulé et que la christianisation a fait disparaître ce qu’il restait des anciennes coutumes celtes. Il est intéressant de constater que trente ans plus tard (gloups), une nouvelle génération d’autrices s’empare des personnages mythiques qu’on connaît par cœur et passe ces légendes au prisme des préoccupations actuelles de notre société. Dans Sistersong comme dans La Duperie de Guenièvre, il n’est plus seulement question de féminisme, comme c’était le cas dans les réécritures du mythe arthurien des années 1970 à 1990, mais aussi d’homosexualité et, surtout, plus nouveau encore, de transidentité.

Ici, Myrdhin (notre bon vieux Merlin) est gender-fluid et Keyne a le malheur d’être né dans un corps possédant des attributs féminins alors qu’il se sent homme. C’est super intéressant parce que ça soulève plein de questions que moi-même je me pose depuis quelque temps : je me suis toujours sentie femme, j’adore être une femme (malgré toutes les emmerdes et tous les combats), mais ça veut dire quoi, dans le fond, être femme ? Qu’est-ce qui fait que je me définis comme telle et, surtout, qu’est-ce qu’une personne ressent quand son identité profonde ne correspond au genre qui lui a été attribué à la naissance ?

De ce point de vue, j’ai eu l’impression que Lucy Holland restait un peu trop en surface. Keyne a très peur qu’on l’enferme dans les vêtements et le rôle d’une femme, il se bat pour qu’on reconnaisse en lui un garçon et le digne héritier de son père le roi, mais j’aurais aimé que sa psychologie soit encore plus fouillée – tout comme celle des autres personnages, d’ailleurs.

Sistersong est un roman divertissant qui a le mérite d’aborder des sujets de société importants, mais il m’a laissé comme un arrière-goût de déception. J’en garderai certes quelques scènes magnifiques (notamment un rituel de Beltane où Keyne danse avec le feu) ou troublantes (ce qui arrive à Sinne), mais je ne peux pas m’empêcher de penser qu’il n’est pas totalement maîtrisé. Par exemple, j’ai rapidement deviné l’identité de Tristan mais je ne suis pas sûre que c’était voulu, j’ai l’impression que c’était censé être l’une des révélations finales.

Malgré tout, j’ai passé un bon moment et j’ai adoré constater, une fois de plus, à quel point les romans historiques sont aussi, et peut-être avant tout, le reflet de notre propre époque…

Cette lecture me permet de valider une des catégories du Shiny Summer Challenge, « Un carré jaune sur un océan bleu », dans le menu « Eté ensoleillé ». Il fallait lire un ouvrage avec « une couverture ensoleillée prédominance jaune ou bleu ».

16 commentaires sur “[Lecture] Lucy Holland – Sistersong

    1. Je n’ai pas encore tenté les romans au format audio, je ne sais pas pourquoi mais je me demande si j’arriverai à être assez attentive. La seule manière de le savoir, c’est d’essayer, il faudra que je m’y mette 😉

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        1. Je suis bien d’accord, pour l’instant je n’ai écouté que des essais ou des mémoires et je suis incapable de me concentrer si je ne fais pas quelque chose de mes mains (ou si je ne suis pas en balade, effectivement).

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  1. Vu ton peu d’enthousiasme, pas sûre de me pencher sur ce roman qui s’inspire pourtant de mythes et personnages que je fréquente depuis mon adolescence (et je tairai le nombre d’années 😉) ainsi que de sujets plus actuels qui me touchent ; d’autant que si j’avais apprécié La duperie de Guenievre, le 2ème tome m’a carrément déçue et je ne lirai pas le 3ème…
    Bref, en matière de réécriture, les meilleures à mes yeux restent la version Marion Zimmer Bradley et la version Barjavel en 1er et Fetjaine en second
    Et j’en profite pour te souhaiter un joyeux anniversaire 😘😘😘

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    1. Tu fais bien de me parler de La Duperie de Guenière, Sistersong m’a donné envie de m’y replonger. Mais vu ton avis, j’hésite à acheter le 2e tome du coup ! Et oui, bien sûr, je garde un souvenir émerveillé des Brumes d’Avalon et de l’Enchanteur, ces lectures ont en partie forgé la femme que je suis devenue.
      Merci mon amie ❤

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  2. Le sujets évoqués ne sont pas simples et peut-être que l’auteur a juste voulu les évoquer sans rentrer dans les détails. Mais je comprends ta déception et du coup je vais passer mon tour!
    La couverture est splendide en tous cas.
    Belle journée Isa

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