
Cette semaine, dans ce billet datant de février 2014, je vous raconte l’histoire d’un heureux hasard qui a changé ma vie. Quand j’ai une décision importante à prendre et que cette histoire me revient en tête, je sais que le moment est venu de passer outre la peur et d’oser me jeter à l’eau.
Février 1999. J’étais en vacances et je me remettais doucement de mes tous premiers partiels. (J’étais en première année de DEUG LEA.) Je devais retrouver ma meilleure amie ce jour-là mais elle avait un empêchement. Du coup, je m’apprêtais à ne pas faire grand-chose de mon après-midi. Et puis, mon frère a proposé de nous emmener en ville, ma mère et moi. A cette époque-là, j’habitais dans la banlieue lilloise. Aller en ville, c’était donc aller faire les boutiques de Lille, une perspective toujours agréable, n’est-ce pas ? Je me souviens m’être dit que je n’étais pas du tout habillée pour ça (comprendre : j’étais habillée pour traîner à la maison) et que je ne devrais peut-être pas sortir comme ça. En même temps, c’est pas comme si je risquais de rencontrer du monde, pas vrai ? J’allais juste faire un tour avec ma mère.
Note pour moi-même, et pour vous aussi : quand on sort quelque part, toujours, toujours s’habiller comme si on avait un rendez-vous important. (Même si, au final, ma tenue n’a eu aucune espèce d’importance, j’en reste quand même vaguement mortifiée.)
Je ne crois pas que ma mère et moi sommes allées plus loin que le Furet du Nord (à l’époque, une des plus grandes librairies de la région). Tandis qu’elle partait faire son petit tour habituel au rayon ésotérique, je suis partie faire le mien au rayon Fantasy-SF. Et là, je suis tombée sur une affiche. Trois auteurs d’une petite maison d’édition dont j’achetais quasiment tous les livres venaient dédicacer leurs ouvrages au Furet. Ils venaient les dédicacer le jour-même. Ils venaient les dédicacer dans une heure.
Autant vous dire que ma mère est repartie toute seule et que moi, je suis restée là à déambuler dans les rayons pendant une heure. Mais il faut savoir que je n’avais encore jamais rencontré d’écrivains et que je manquais énormément d’assurance à l’époque. Du coup, j’ai passé ces soixante (très longues) minutes à débattre avec moi-même, partagée entre la terreur et l’excitation.
Non, tu ne vas pas oser les aborder, tout de même ? Tu vas juste t’approcher, voir à quoi ils ressemblent et puis tu vas rentrer bien sagement chez toi.
Quoi ? Mais tu es folle ! Tu adores leurs bouquins, tu vas pouvoir te les faire dédicacer et leur parler en vrai ! C’est trop génial !
Ce qu’il y a de bien chez moi, c’est qu’une fois au pied du mur, je me jette à l’eau et j’oublie tout. C’est comme ça que j’ai obtenu 16 de moyenne au bac en histoire-géo alors que je venais de passer une nuit blanche et comme ça aussi que j’ai eu 19 à mon premier oral d’espagnol à la fac alors que je me liquéfiais de trouille juste avant d’entrer dans la salle. Du coup, au lieu de céder à la peur, j’ai osé parler à ces trois écrivains. Et j’ai même fait mieux que leur parler. L’un d’eux était aussi le directeur de la maison d’édition. Sachant qu’ils ne publiaient à l’époque que de jeunes auteurs français, j’ai osé lui dire que j’écrivais de la Fantasy, moi aussi. On a parlé plus d’une demi-heure ensemble. Le lendemain, je lui envoyais mon manuscrit. Six mois plus tard, je signais mon premier contrat d’édition.
Cette rencontre, qui n’aurait jamais eu lieu sans le désistement de mon amie et la proposition de mon frère, a tout changé dans ma vie. A l’été 2001, j’ai fait un stage auprès de cet éditeur dans la nouvelle maison d’édition qu’il venait de fonder avec des amis. Un mois plus tard, ils m’envoyaient représenter leur maison à un petit salon littéraire dans le Sud. J’y ai rencontré le père de mes enfants, l’homme avec qui j’ai partagé quatorze ans de ma vie. En janvier 2003, ces mêmes éditeurs me proposaient ma première traduction. Depuis, je n’ai jamais cessé de travailler pour eux.
Je dois tout à cette rencontre. Je lui dois ma carrière et, d’une certaine façon, mes enfants. Evidemment, sur le moment, je n’ai pas eu conscience de vivre un moment déterminant. Pourtant, j’étais bel et bien à une croisée des chemins. Si j’avais cédé à la peur, si je m’étais enfuie (il n’y a pas d’autres mots pour ce que j’ai ressenti à ce moment-là), ma vie aurait sans doute pris une toute autre tournure. On ne le saura jamais, bien sûr, mais je suis heureuse que les choses se soient passées ainsi et je chéris ce souvenir parce que c’est la première fois de ma vie où j’ai osé m’affirmer, où j’ai osé dire : « Voici qui je suis. »
Et je peux vous dire que ça fait vachement du bien.
Illustration trouvée à l’origine sur Etsy, mais le lien qui figurait sur mon ancien blog n’est plus valide, si vous en connaissez la provenance, faites-moi signe !
C’est une sacrée belle histoire ! Et c’est drôle que tu la racontes aujourd’hui parce que pas plus tard que mardi, j’j’ai terminé de trier et ranger mes bouquins et ton roman a rejoint sur l’étagère un des livres que tu as traduits ❤️
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Oh, de quel livre s’agit-il ? Et merci ❤
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Je ne savais pas que tu avais écrit un roman Isa!
Je dis « chapeau » et bravo d’avoir dépassé ta peur car le résultat est en effet très positif. Il y a des moments comme ça, on ne le sait pas toujours, où nos vies prennent des chemins inattendus. C’est le genre d’histoire qui me touche.
Merci de l’avoir partagé avec nous.
Je t’embrasse et belle journée
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Avec plaisir ! Merci Marie ❤
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C’est une bien belle histoire ❤ La vie est pleine de rdv, je trouve…
Gros bisous
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Oui, ce sont des moments magiques ! Gros bisous ❤
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Quelle belle histoire ! Je t’admire parce que moi j’ai tendance à perdre mes moyens.
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Il m’arrive de les perdre aussi, raison de plus pour célébrer les fois où on arrive à se dépasser 😉
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